Garrincha, "Alegria do Povo" : L’histoire d’un génie du football

Le football a connu de nombreux magiciens du ballon rond, mais peu ont marqué les esprits avec autant de grâce, de dribbles déroutants et d’émotions que Manuel Francisco dos Santos, plus connu sous le nom de Garrincha. Surnommé "Alegria do Povo" (La Joie du Peuple), il a conquis le cœur des Brésiliens et du monde entier grâce à son talent exceptionnel et sa personnalité unique.
Son histoire est celle d’un gamin handicapé devenu un héros national, d’un joueur qui a éclipsé même Pelé lors des Coupes du Monde, et d’un destin aussi lumineux sur le terrain que tragique en dehors.
Une naissance sous le signe de l’adversité
Né le 28 octobre 1933 à Pau Grande, un petit village du Brésil, Garrincha ne semblait pas destiné à devenir une légende du football. Dès sa naissance, il souffrait de plusieurs malformations physiques :
- - Une colonne vertébrale déformée
- - Une jambe droite plus courte que la gauche de 6 cm
- - Une jambe gauche arquée vers l’extérieur
Ces problèmes auraient pu briser son rêve de football avant même qu’il ne commence. Mais Garrincha était doté d’un don exceptionnel : un dribble dévastateur, une vitesse surprenante et une créativité qui allaient faire de lui l’un des plus grands joueurs de tous les temps.
Les débuts au Botafogo : un talent brut qui explose
En 1953, à 19 ans, il passe un essai au Botafogo, l’un des plus grands clubs brésiliens. Face à Nilton Santos, une légende du football brésilien, il réalise un enchaînement de dribbles spectaculaires, humiliant son adversaire. Impressionné, Nilton Santos exige que le club le recrute immédiatement.
Dès ses premiers matchs, Garrincha émerveille les supporters. Il dribble comme personne, dépasse les défenseurs avec une facilité déconcertante et illumine les terrains avec son sourire enfantin. Il joue pour le plaisir, avec insouciance, sans jamais se soucier des tactiques ou des schémas de jeu.
Avec Botafogo, il va remporter trois titres de champion de Rio de Janeiro (1957, 1961 et 1962) et marquer plus de 230 buts en 612 matchs.
Mais c’est avec la Seleção qu’il va devenir une véritable légende.
1958 : La Coupe du Monde qui le révèle au monde
Garrincha est sélectionné pour la Coupe du Monde 1958 en Suède, mais reste sur le banc lors des premiers matchs. Ce n’est qu’au troisième match, face à l’URSS, que le sélectionneur décide de l’aligner aux côtés d’un jeune prodige de 17 ans : Pelé.
Le duo fait des étincelles. Dès les premières minutes, Garrincha mystifie la défense soviétique et son style spectaculaire enthousiasme le monde entier. Grâce à lui et à Pelé, le Brésil écrase ses adversaires et remporte sa première Coupe du Monde.
1962 : Garrincha seul au sommet du football mondial
Si la Coupe du Monde 1958 avait été celle de la révélation, celle de 1962 au Chili sera son chef-d'œuvre. Pelé se blesse dès la phase de groupes, laissant l’équipe orpheline de son meilleur joueur. Mais Garrincha prend les choses en main et porte le Brésil sur ses épaules.
Il marque 4 buts décisifs et réalise des performances hallucinantes, notamment en demi-finale contre le Chili (2 buts) où il est intenable. En finale, malgré une blessure, il joue et permet au Brésil de s’imposer 3-1 contre la Tchécoslovaquie.
Garrincha devient alors le premier joueur de l’histoire à remporter à la fois le titre de meilleur joueur, meilleur buteur et la Coupe du Monde.
Le Brésil l’adule, et son surnom "Alegria do Povo" prend tout son sens.
1963 : "Alegria do Povo", le film qui immortalise la légende
En 1963, la carrière de Garrincha atteint son apogée. Son talent unique et son charisme inspirent le réalisateur Joaquim Pedro de Andrade, qui décide de lui consacrer un documentaire intitulé "Garrincha, Alegria do Povo".
Ce film met en lumière son génie, sa joie de vivre et l’amour du peuple brésilien pour lui. On y voit ses dribbles fantastiques, ses buts inoubliables et son incroyable lien avec les supporters.
Mais derrière les sourires et les feintes magiques, le documentaire laisse entrevoir les premières ombres qui vont assombrir sa vie...
La chute : blessures, alcool et déchéance
Après 1963, la carrière de Garrincha commence à décliner. Son style de jeu explosif use son corps, et ses blessures se multiplient.
1966 : la Coupe du Monde de trop
Il participe à la Coupe du Monde 1966, mais le Brésil est éliminé prématurément. Ce sera son dernier match avec la Seleção.L’alcool, son pire adversaire
Dès les années 60, Garrincha tombe dans l’alcoolisme, une addiction qui va ruiner sa carrière et sa vie personnelle.Une fin tragique
Ruiné, malade et oublié, Garrincha décède le 20 janvier 1983, à seulement 49 ans, des suites de son alcoolisme.
L’héritage d’un artiste du football
Malgré sa fin tragique, Garrincha reste une icône du football. Il incarne le jeu pur, le dribble instinctif et l’amour du football sans artifice.
Son surnom "Alegria do Povo" résonne encore aujourd’hui dans les rues du Brésil, et son histoire rappelle que le football est avant tout un jeu, un plaisir, une magie.
Garrincha était plus qu’un joueur : il était une légende, un poète du ballon, un symbole d’émotions brutes.
Son dribble continue d’inspirer des générations entières et son nom restera à jamais gravé dans l’histoire du football. 🏆⚽